ZH2O. C’est le label que l’Office du tourisme de Zurich a choisi pour la bouteille de 4 décilitres d’eau du robinet de la ville qui sera bientôt vendue aux touristes en guise de souvenir. « Une opération parfaitement légale », précise Le Matin du 20 mai 2005, « à condition de ne pas la faire passer pour de l’eau minérale ».
Le même Office du tourisme propose aussi aux restaurateurs de vendre l’eau du robinet deux francs le verre. Au journaliste du quotidien romand, on explique que « ce n’est pas une question d’argent » mais qu’il s’agit de faire connaître l’eau du réseau zurichois : « après tout, les analyses le prouvent : elle est souvent bien meilleure que celle sortie des bouteilles. »
Et si le client doit ouvrir son porte-monnaie, c’est, dit-on, pour « payer le service ». Il paraît même que l’on songe aussi à prélever une partie de la somme encaissée pour la reverser à des projets de développement dans le tiers monde. La charité prend de la bouteille...
Le respect du métier
Quatre jours plus tard, le journal 24 Heures, qui a mené enquête dans les bistrots lausannois, révèle que certains restaurateurs, pour faire face à la forte augmentation de la demande, « ont choisi de faire payer la carafe d’eau du robinet », entre 1 et 2,50 francs.
Précision importante : le prix à la carafe n’est semble-t-il imposé que lorsque le client ne commande aucune autre boisson. « Mes charges augmentent », raconte l’un des bistrotiers cité par le journal, « il est difficile de les répercuter. Je paie une personne pour servir et laver le récipient ainsi que les verres. Et certains viennent juste pour consulter les journaux. »
Un autre explique qu’il fait cela non pour s’enrichir, « mais pour faire respecter ce métier ». D’ailleurs, « c’était une demande du personnel, qui ne voyait pas pourquoi ça continuerait à être gratuit » et que « la somme désormais perçue est intégralement reversée aux serveurs ».
Fontaines à bactéries ?
Le 31 mai, l’émission À Bon Entendeur de la Télévision suisse romande s’intéresse aux « fontaines à eau ou fontaines à bactéries ? » qui fleurissent dans les bureaux, grands magasins et autres lieux publics. Actuellement, en Suisse, il se vend chaque année un million et demi de bonbonnes, c’est-à-dire 28 millions de litres environ.
Commentaire de l’émission ABE : « En plus des montagnes de déchets générées par les gobelets, ce système implique tout un va-et-vient par camion, pour amener les bouteilles pleines et les faire repartir, à vide, vers l’usine de production. Quand on connaît l’état de la planète et si l’on veut laisser une ou deux gouttes de pétrole ainsi que quelques bouffées d’air respirable aux prochaines générations, il serait temps de se demander si ce genre de commerce est vraiment prioritaire. »
Tant il est vrai qu’en Suisse, « l’eau du robinet est excellente, aussi bien en terme de goût que sur le plan bactériologique. Dans certaines régions, c’est même de l’eau de source qui coule dans les tuyaux, identique parfois à celle mise en bouteille et vendue dans le commerce. »
Eaux stagnantes
Les enquêteurs d’ABE ont voulu en savoir un peu plus sur la qualité de ces bonbonnes et en ont fait analyser près d’une trentaine d’échantillons prélevés ici et là en Suisse romande. Pour le laboratoire cantonal vaudois, il semble clair, au vu des résultats, que « la manière de distribuer de l’eau en fontaine n’est pas encore optimale, contrairement à l’eau de réseau, la plupart du temps ».
C’est que l’eau des bonbonnes est une eau stagnante, qui dépend de surcroît des conditions d’entreposage, de lumière et de température qui, si elles ne sont pas adéquates, peuvent favoriser le développement de germes dont certains peuvent présenter un risque pour la santé. Alors que, faut-il le rappeler ?, l’eau du robinet est contrôlée en permanence par les services de distribution.
Et qu’en est-il du porte-monnaie ? Laissons la réponse à l’émission ABE : « 750 francs en moyenne pour un mètre cube d’un côté, contre 1 franc 50 de l’autre, pour le même mètre cube au robinet... économiquement, il n’y a pas photo non plus ! Pourtant, les entreprises qui ont réussi à résister à l’invasion de la bonbonne de 5 gallons ne sont pas nombreuses. »