Bien des observateurs estimaient, avant le vote, que le référendum était quasiment voué à l’échec, pour plusieurs raisons : pour qu’un référendum aboutisse dans cette ville-État, il faut non seulement qu’il rallie la majorité des votants mais aussi que 25 % au moins du corps électoral y participe, condition difficile à remplir quand il faut mobiliser les électeurs autour d’un seul et unique sujet de vote ; par ailleurs, les Berlinois avaient encore en mémoire l’échec de deux référendums précédents, dont l’un sur la fermeture définitive du célèbre aéroport de Tempelhof.
Non seulement les électeurs berlinois ont rempli les conditions minima - la participation aura finalement été de 27 % - mais le résultat du vote, avec plus de 98 % de oui, ressemble un véritable raz-de-marée en faveur des partisans de la remunicipalisation des services de l’eau.
Les promoteurs de l’initiative, regroupés dans un réseau baptisé ’Berliner Wassertisch’, réclament ouvertement le contrôle démocratique de la distribution de l’eau (“l’eau appartient aux citoyens”) et sa gestion transparente (“il faut mettre fin aux contrats secrets”). En quelques mois, ils ont récolté quelque 280’000 signatures (170’000 étaient requises) et obtenu la convocation de l’électorat local.
Il faut savoir que depuis 1999, 49,9 % du capital des services de l’eau berlinois - ‘Berliner Wasser Betriebe’ (BWB) - reposent dans les mains du groupe allemand RWE (Rheinisch-Westfälisches Elektrizitätswerk AG) et de la multinationale française Veolia, les 50,1 % restants sont détenus par le gouvernement du Land de Berlin.
Les militants de la ‘Berliner Wassertisch’, estimant que cette privatisation n’est pas conforme au droit, et arguant d’une augmentation indue des tarifs (+ 23 % depuis 2003, selon leurs calculs) ont demandé que les contrats soient ouverts à la consultation publique. Certaines clauses ayant été divulguées dans la presse, il est apparu que les bénéfices des actionnaires des deux sociétés étaient garantis par un système compensatoire dont le Land de Berlin, mais surtout les usagers, faisaient les frais.
Suite à ces révélations, le gouvernement de Berlin et ses deux partenaires privés ont publié un certain nombre de contrats et documents relatifs à cette privatisation (quelque 700 pages). Mais leurs adversaires ont jugé ce dossier incomplet et le succès de leur référendum leur permettra d’exiger la publication, dans le délai d’un an, de l’intégralité des contrats et des accords passés depuis 1999. On peut s’attendre aussi à ce que la ‘Berliner Wassertisch’ ne se contente pas de cette victoire politique et mène désormais campagne pour un retour complet des services de l’eau en mains publiques. (Sources : agences et presse allemande)