– Pour le suivi de cette information,
voir l’article aqueduc.info du 10 février 2019 :
Les Zurichois rejettent leur nouvelle loi sur l’eau
Dans le canton de Zurich, le droit de l’eau était régi jusqu’à présent par deux lois séparées, l’une sur la gestion de l’eau, l’autre sur la protection des eaux. Toutes deux sont jugées obsolètes et ne répondent plus aux normes et exigences techniques actuelles en matière par exemple d’approvisionnement en eau, d’assainissement urbain ou de protection contre les inondations. La nouvelle loi sur l’eau, adoptée par le Parlement cantonal le 9 juillet 2018 à une courte majorité (84 voix contre 77), regroupe toutes les dispositions juridiques remises à jour dans un seul et unique document qui s’applique à toutes les eaux publiques et privées. [1]
Bien public et intérêts privés
Dans la brochure officielle d’information sur les enjeux de la votation, le gouvernement zurichois, qui recommande le oui, rappelle que la nouvelle loi repose sur des principes incontestés, par exemple celui d’un partage rigoureux des responsabilités entre canton et communes ou celui qui veut que toutes les eaux du canton sont publiques hormis quelques droits historiques.
Dans le domaine de la protection contre les inondations, la loi stipule que les mesures prises par les pouvoirs publics dans les zones d’habitation doivent pouvoir résister à des crues centennales et des normes plus strictes encore seront appliquées dans des configurations spéciales comme les hôpitaux ou les zones industrielles à risques. Cela devrait aller de pair avec des améliorations environnementales. D’ailleurs, d’un point de vue écologique, la nouvelle législation prend en compte le principe de "promotion de la renaturation des eaux" inscrit dans la constitution cantonale.
Les opposants font quant à eux plusieurs griefs à la nouvelle loi : ils estiment en tout cas que "les intérêts particuliers sont systématiquement placés devant les intérêts du public", notamment en ce qui concerne l’accès au lac (en cas de litige, disent-ils, c’est l’État qui devrait prouver aux propriétaires fonciers qu’un plan d’eau est public et non l’inverse).
Selon les référendaires, la loi sous-estimerait les impératifs de la protection de l’environnement tels qu’énoncés par la législation fédérale et n’en proposerait que le strict minimum, freinant ainsi les projets de renaturation des cours d’eau et de réglementations efficaces contre les engrais et les pesticides. Elle ne tiendrait pas suffisamment compte non plus des nouvelles menaces et des risques prévisibles liés aux changements climatiques, négligeant par exemple de rechercher des solutions techniques durables pour couvrir les besoins agricoles d’irrigation.
L’article 107, pierre d’achoppement
Cet article stipule dans son deuxième paragraphe que "le transfert [des tâches d’alimentation en eau et d’assainissement urbain] à des personnes morales de droit privé n’est autorisé que si une municipalité ou un groupe de plusieurs municipalités ou un organisme municipal organisé de manière privée et contrôlé par des municipalités détient la majorité du capital et au moins les deux tiers des droits de vote".
Pour le comité référendaire, cette "réglementation dangereuse" représente purement et simplement "un premier pas vers la privatisation de l’approvisionnement en eau potable". Les opposants avancent comme argument, entre autres, les "très mauvaises expériences" faites à l’étranger, à Berlin par exemple, où le prix de l’eau a augmenté d’un tiers pendant que le secteur privé engrangeait des profits par millions. D’où le slogan des députés qui s’étaient opposés à l’adoption de la loi : "Hände weg von unserem Wasser !", "Ne touchez pas à notre eau !"
Sur ce point précis, le gouvernement zurichois se veut rassurant : "les craintes que la loi encourage la privatisation de l’approvisionnement en eau et finalement la commercialisation de l’eau potable ne sont pas fondées". Certes, explique-t-il, la nouvelle loi permet à des sociétés privées de prendre des participations minoritaires dans l’alimentation en eau, mais dans le cadre d’éventuelles sociétés anonymes, elle oblige les municipalités en toutes circonstances à détenir à la fois la majorité du capital-actions et au moins les deux tiers des droits de vote. De tels garde-fous excluent, selon les partisans de la nouvelle loi, toute dérive vers un éventuel commerce lucratif de l’eau potable. Bien au contraire, l’ouverture à des investisseurs privés devrait faciliter la fusion de services publics municipaux mixtes dans des entités plus grandes et plus efficaces. (bw)