Comme le phénomène échappe généralement à l’oeil nu, Pro Natura a mandaté Christa Dähler, ingénieure forestière, pour photographier des marais et comparer ces images avec des photographies des mêmes endroits prises dans les années 1980. Conclusion : plus d’un marais est difficile à reconnaître. À la place d’un site marécageux ouvert et dépouillé, on voit une végétation dense et abondante, conséquence des interventions destructrices faites par le passé en vue d’assécher les marais.
C’est une évolution insidieuse, imperceptible et néanmoins dramatique, estime Pro Natura : les sites marécageux de Suisse, pourtant protégés par la Constitution, menacent de s’assécher complètement. Selon les statistiques suisses, quelque 10 km carrés de marais ont déjà été envahis par la végétation de 1983 à 1995, ce qui correspond à la surface d’environ 1600 terrains de football.
Il y a vingt ans, les citoyens suisses avaient décidé, avec l’Initiative dite de Rothenturm, de protéger les plus beaux marais et sites marécageux d’importance nationale. Les cantons ont donc pour tâche de préserver intégralement les marais et d’encourager, à chaque fois que l’occasion se présente, la régénération des zones marécageuses altérées. Quelques mesures ont certes été prises depuis lors, mais elles ne sont de loin pas suffisantes : de nombreux marais en Suisse s’assèchent et s’embroussaillent pratiquement sans qu’on s’en inquiète vraiment. Des paysages et des associations végétales uniques disparaissent.
Exemple d’assèchement : le marais des Ponts-de-Martel, dans le canton de Neuchâtel © Daniel Weber/Pro Natura
« Comme les canaux de drainage continuent d’évacuer l’eau des marais, ceux-ci se détruisent eux-mêmes avec le temps. Les couches supérieures de tourbe se dessèchent et libèrent des éléments nutritifs. Ces éléments nutritifs permettent à des arbustes nains, comme les fausses bruyères ou les myrtilles, puis à des bouleaux, à des pins et à des épicéas de s’implanter dans le marais. Les arbres extraient davantage d’eau du marais par évaporation, ce qui libère encore plus d’éléments nutritifs. La destruction du marais se fait toujours plus rapide, l’association végétale du haut-marais se dessèche et étouffe dans ses propres éléments nutritifs. » (Source : communiqué Pro Natura)