Depuis quelques années, les hivers américains se révélent plus chauds et plus courts que par le passé, amenant moins de neige mais aussi moins de skieurs. Les responsables de la station de Snowbowl ont estimé que la seule réponse possible aux impacts négatifs - touristiquement et économiquement parlant - de ce changement climatique était de recourir à une ressource largement disponible sur place, à savoir les eaux usées.
Précision importante : ces eaux usées sont recyclées après avoir transité par plusieurs types de traitement. Leur qualité est jugée suffisante pour qu’elles puissent être réaffectées à d’autres usages qui ne nécessitent pas qu’elles soient potables. Selon le Service national des forêts, propriétaire des terrains où sont aménagées les pistes de ski, l’eau traitée est conforme aux normes les plus élevées, juste en dessous du niveau de qualité de l’eau potable. D’ailleurs elle est déjà abondamment et depuis longtemps utilisée pour l’arrosage des terrains de sport, des parcours de golf et des parcs municipaux.
Dans deux articles publiés dans les pages et sur un blog du New York Times, Leslie MacMillan rappelle que cette décision n’a pas été prise sans polémique, puisque c’est au terme d’une saga judiciaire d’une dizaine d’années qu’une cour d’appel fédérale a finalement donné son feu vert à la station de Snowbowl. Une coalition d’organisations écologistes et de représentants de plusieurs tribus indiennes estime en effet que l’introduction de cette pratique constitue un véritable désastre à la fois environnemental et culturel. Parce que, d’une part, elle représente une menace environnementale pour une zone montagneuse fragile, pour la qualité des aquifères et pour la santé humaine, et que, d’autre part, elle est considérée par les communautés autochtones comme la profanation d’un espace quasi sacré. Des arguments finalement balayés par la justice.
N’empêche. Des scientifiques, à la demande des autorités locales, se sont penchés sur la question. Les eaux recyclées ne sont pas exemptes de traces infiniment petites (de l’ordre du nanogramme) de médicaments, produits chimiques et autres contaminants que l’on trouve d’ailleurs aussi dans les cours d’eau. Mais, dans ce domaine, les interrogations demeurent encore et toujours plus nombreuses que les réponses, en raison notamment de la complexité des interactions entre les différentes substances en cause : qu’en sera-t-il par exemple des impacts du gel et du dégel sur ces composés chimiques ou du développement de bactéries dans les tuyaux amenant les eaux recyclées aux canons à neige ?
Parmi les FAQ (questions les plus fréquentes posées par les internautes) inscrites sur le site web de la station de Snowbowl, on trouve celle-ci : "mes enfants vont-ils tomber malades s’ils mangent de la neige fabriquée à partir d’eaux usées traitées " ? La réponse est non : l’utilisation d’eau recyclée pour l’enneigement ne présente pas de risques pour la santé. Mais, est-il aussitôt précisé, "quiconque mange de la neige doit être conscient de ce qu’il peut avaler, car sur un domaine skiable, la neige peut être mise en contact avec des animaux, des déchets, des chaussures, de la salive, des produits pétroliers provenant des machines de damage des pistes, etc.". (Source : presse américaine)
– Lire aussi à ce sujet l’édito aqueduc.info d’août 2012 :
"Eau usée recyclée, ressource fiable ?"