Pour en comprendre les enjeux, il convient de se souvenir de ce qui s’est passé du côté de la Mer d’Aral. En un demi-siècle, suite au détournement de ses principaux affluents pour irriguer de façon intensive les champs de coton de l’ex-Union soviétique, ce vaste lac d’eau salée partagé par le Kazakhstan et l’Ouzbekistan avait perdu les trois quarts de sa surface et 90% de son volume. Il n’y a guère d’autres exemples sur la planète pour illustrer de manière aussi spectaculaire les effets catastrophiques d’un usage non durable de l’eau.
Présente en Asie centrale depuis plusieurs années par le biais d’un programme régional de coopération au développement dédié notamment à la gestion intégrée des ressources en eau, la diplomatie suisse a estimé qu’elle était bien placée pour soutenir dans ce domaine la mise en place de structures transfrontalières communes aux cinq pays concernés, à savoir le Kazakhstan, le Kirghizistan, l’Ouzbékistan, le Tadjikistan et le Turkménistan.
À Astana, lors de l’ouverture de cette deuxième conférence "Blue Peace Central Asia", le ministre suisse des affaires étrangères, Didier Burkhalter, a redit sa conviction qu’il existe "un énorme potentiel pour transformer l’eau d’une source de crise en une source de paix et de stabilité" mais que cela ne devient réalité que si l’on élimine les barrières – politiques, économiques, sociales, techniques – qui empêchent toute coordination efficace des ressources hydriques, en cherchant des solutions innovantes et en favorisant la participation des jeunes générations.
Le ministre n’a pas manqué non plus de rappeler qu’en matière de gestion de l’eau cette région possède une longue et unique expérience : "Les technologies de gestion de l’eau inventées en Asie centrale, il y a plusieurs milliers d’années, ont contribué à créer de la vie et de la culture dans les déserts, les steppes et les montagnes. Elles ont au Moyen-Âge donné naissance à une civilisation qui en a inspiré beaucoup d’autres. L’eau a été un facteur de croissance, en Asie centrale comme ailleurs. Il existe toutefois aujourd’hui un risque que cet atout devienne un goulet d’étranglement pour le développement futur."
Pour le gouvernement suisse, s’engager dans la diplomatie de l’eau a non seulement pour objectif de favoriser le dialogue et la mise au point de solutions politiques sur les questions liées à l’eau et à la sécurité dans des régions stratégiques, comme le Proche-Orient ou l’Asie centrale, mais aussi de soutenir les échanges de savoir-faire techniques et la réalisation de projets concrets dans les domaines notamment de l’approvisionnement en eau et de l’assainissement.
C’est dans cet esprit qu’en 2015 la Suisse a également initié un panel mondial sur l’eau et la paix chargé d’élaborer des propositions en vue de développer des instruments et une structure permettant de prévenir et de réduire les conflits liés à l’eau à l’échelle mondiale et régionale. Les quinze experts de ce panel devraient publier leur rapport en automne 2017. (Source : Coopération suisse au développement - DDC)