LE GRAND BISSE DE LENS, OU RIOUTA
Le 21 juillet 1448 - un document authentique l’atteste - le Prieur Jean s’était engagé envers les représentants de la commune de Lens à construire dans un délai de deux ans un aqueduc "conduisant vers le village de Chermignon d’En Bas avec les mesures de manière à ce que l’eau puisse bien couler". Ce qui fut fait. D’une longueur de près de 14 kilomètres pour un dénivelé total de 130 mètres (1 % !), il prend son eau dans la Lienne à 1113 mètres d’altitude.
Dans les années 60, l’idée germa de creuser un tunnel dans la colline du Châtelard qu’il contournait, car non seulement ses pertes d’eau devenaient trop importantes, mais de fréquents éboulements perturbaient son cours. Suite à une rupture qui causa de gros dégâts dans les vignes, ce tunnel de 830 mètres fut donc percé au début des années 1980. La partie inutilisée et asséchée du bisse se combla naturellement peu à peu.
Sa réhabilitation, commencée en 2008, répondait à une double ambition : d’une part conserver et remettre en valeur un élément historique important du patrimoine agricole de la région, et d’autre part réaménager le sentier pédestre faisant le tour de la colline en longeant le bisse qui a été remis en eau au début de l’été 2010.
– En savoir plus sur le site de la Commune de Lens
– Sur le site de la Télévision Suisse Romande : Remise en eau du Grand Bisse de Lens, émission "Ensemble" du 1er août 2010 consacrée à la Fondation suisse pour la protection et l’aménagement du Paysage (durée : 3’39")
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Le TORRENT-NEUF OU BISSE DE SAVIÈSE
Le Bisse de Savièse, qui s’approvisionne en eau dans la vallée de la Morge, date de la même époque que celui de Lens puisqu’il a été construit entre 1430 et 1448. Au cours des siècles, son tracé - dont une portion traverse la paroi vertigineuse des Branlires - a été modifié et amélioré à plusieurs reprises pour accroître sa capacité. Cela impliquait, entre autres, de recourir à une technique très particulière - les boutzets - une construction n’utilisant que le bois et soutenant la canalisation grâce à un système de deux poutres fixées horizontalement dans le rocher et reliées entre elles par une traverse verticale.
Il n’est guère difficile d’imaginer les problèmes que posaient son entretien et sa remise en eau annuelle. Pourtant les Saviésans l’utilisèrent ainsi jusqu’en 1934, année de son ultime mise en eau car, comme à Lens, il avait entre temps été décidé de creuser un tunnel (long de 4,5 km) sous la colline du Prabé. Les aménagements du bisse abandonné furent alors détruits, en partie, pour des raisons de sécurité.
Une soixantaine d’années s’écoulent jusqu’à ce qu’un projet de rénovation voie le jour. Puis une décennie encore jusqu’en 2005 lorsque se crée une Association pour la sauvegarde du Torrent-Neuf. Elle prend alors la décision, avec la commune de Savièse, de s’engager dans des travaux de réhabilitation qui débutent finalement en 2009 et devraient être achevés en 2011. Le sentier, dont la première partie a déjà été ouverte au public, sera rétabli sur plus de 4 kilomètres, non sans quelques aménagements techniques spectaculaires (dont plusieurs passerelles suspendues) et jalonné d’utiles panneaux didactiques. Quant à l’eau, comme disent certains, elle "roucoule" déjà sur une partie de l’ancien bisse… (bw)
– Voir le site de l’Association pour la sauvegarde du Torrent-Neuf
– Sur le site de la Télévision Suisse Romande : Le Bisse de Savièse, reportage (26 min.) diffusé dans l’émission "Passe-moi les jumelles" du 07 octobre 2009
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:: Les bisses, un modèle d’utilisation durable de l’eau ?
Dans le cadre du Programme national de recherche sur la gestion durable de l’eau (PNR 61), initié cette année, un projet sur les "Canaux d’irrigation", piloté par la Fondation suisse pour la protection et l’aménagement du paysage, analysera l’importance des fonctions écologiques et socioculturelles des bisses historiques et des modes d’exploitation traditionnels des prairies. L’influence des canaux à ciel ouvert sur la forêt de montagne et la végétation des prés de fauche constituera l’un des points forts du projet. À quoi s’ajoutera l’étude des droits de propriété et d’usage souvent détenus par des consortages. Cette recherche devrait déboucher, au final, sur un modèle d’exploitation durable de la ressource "eau" dans des zones de montagnes arides.
– Créée en 1970 par un groupe d’associations, la Fondation suisse pour la protection et l’aménagement du paysage (FP) s’est fortement engagée dans des actions de réhabilitation d’anciens bisses historiques, en Valais, mais aussi au Tessin et dans le Val Müstair (Grisons).
– Pour sa part, le Fonds Suisse pour le Paysage (FSP), né d’une décision du Parlement fédéral en 1991, soutient une quarantaine de projets pour la sauvegarde des bisses en Valais.