AccueilMots d’eau

6 octobre 2006.

Poètes

L’eau des écrivains et des poètes

L’amour s’en va comme cette eau courante
L’amour s’en va
Comme la vie est lente
Et comme l’Espérance est violente
Guillaume Apollinaire, "Le Pont Mirabeau"

Dans la cour le jet d’eau qui jase
Et ne se tait ni nuit ni jour,
Entretient doucement l’extase
Où ce soir m’a plongé l’amour.
Charles Baudelaire, "Le jet d’eau"
("Les fleurs du mal")

... Quelques grosses gouttes s’écrasent sur les boubous et vite dans la tête le bonheur pour tout le monde, humains, animaux. Des rêves verts, de l’eau comme des rivières, des rires d’enfants pleins de savon, des légumes avec des couleurs. La terre redevient nourricière...
Richard Bohringer, "Burkina Faso, Les paradoxes de l’eau"

L’eau, il faut s’en méfier. Les Prilepois ne font d’ailleurs pas grand cas de la leur. Ils lui trouvent un goût pauvre et commun. Je n’ai rien remarqué, mais qui dans nos climats se soucie du goût de l’eau ? Ici c’est une marotte ; on vous engage à faire dix kilomètres à pied pour une source dont l’eau est excellente.
Nicolas Bouvier, "L’usage du monde"

"On ne sait plus de quel côté les fleuves coulent ; on est obligé de casser la glace pour apprendre à quel orient il faut se diriger."
Chateaubriand, "Mémoires d’outre-tombe"

Bruit du ruisseau. Effet simple. Classique, donc porté par des milliers d’années de gestes, de mouvements, de battements, de glissements où l’eau pousse sa folie de pente en pente par des courbes, des anses, des haltes, des regrets, des exaltations brèves. Les voix de l’églogue, et les clarinettes, les cordes. Cloches enfouies et tintant dans les arbres, petit orchestre sans musiciens. L’eau seule joue de tous ces sons (...)
Jacques Chessex, "Feux d’Orée"

Comme il peut l’être par sa première idylle, un homme sensible est toujours marqué par son premier fleuve. Qu’on le lui prenne ou qu’il s’en éloigne, ses eaux continueront de lui couler dans le sang.
Bernard Clavel, "Rhône, mon premier fleuve"

...en plein soleil, le long du chemin de halage,
Quatre percherons blancs, vigoureux attelage,
Tirent péniblement, en butant du sabot,
Le lourd bateau qui fend l’onde de l’étambot...
François Coppée, "Promenades et intérieurs"

La vie, c’est de l’eau.
Si vous mollissez le creux de la main,
vous la gardez.
Si vous serrez les poings,
vous la perdez.
Jean Giono, "L’eau vive"

La simplicité du fleuve et de ses eaux toujours différentes prend un sens plus inquiétant lorsqu’elle mène à penser notre habitation dans le creuset du Temps.
Héraclite

La pluie a versé ses ondées ;
Le ciel reprend son bleu changeant ;
Les terres luisent fécondées
Comme sous un réseau d’argent.
Le petit ruisseau de la plaine,
pour une heure enflé, roule et traîne
Brins d’herbe, lézards endormis,
Court, et, précipitant son onde
Du haut d’un caillou qu’il inonde,
Fait des Niagaras aux fourmis.
Victor Hugo, "Odes et Ballades"

Le Doubs parle un vieux langage. Si vieux que les hiéroglyphes
tracés à l’encre verte, bleue et noire de son eau, conservent un impérissable mystère. Celui de ses images, innombrables et magiques.
Paul Jubin, "Images du Doubs"

Dans le cristal d’une fontaine
Un Cerf se mirant autrefois
Louait la beauté de son bois,
Et ne pouvait qu’avecque peine
Souffrir ses jambes de fuseaux,
Dont il voyait l’objet se perdre dans les eaux.
Jean de La Fontaine, "Le cerf se voyant dans l’eau" ("Fables", Livre VI)

La circulation des mots s’apparente à celle de l’eau : la parole elle aussi s’enfonce, s’endort, gît ou voyage dans nos mémoires ainsi que l’eau dans les profondeurs du sol. Sans eau pas de terre fertile, sans langage pas de société, sans eau et sans langage, pas de vie.
Bruno de La Salle

… Je dessine un fleuve. Le but est précis : aller d’un point à un autre : fleuve ou idée. Surgit un incident infime, - les incidences de l’esprit : de suite, un petit coude de rien du tout, à peine sensible. L’eau est rejetée à gauche, elle entame la rive ; de là, par incidence, elle est rejetée à droite. Alors, la droite n’est plus. À gauche, à droite, toujours plus profonde, l’eau ronge, creuse, entame ; - toujours plus élargie, l’idée bat la campagne… "
Le Corbusier, "Précisions sur un état de l’architecture et de l’urbanisme"

Comme l’algue fugitive
Sur quelque sable de la rive
La vague aura roulé mes os.
Alphonse de Lamartine, "Méditations"

L’eau, c’est l’eau. Qu’importe qu’elle soit pure ou impure, bouillon de culture ou bouillon de onze heures, l’assoiffé s’y précipite avec envie et violence. On résiste à la faim, pas à la soif.
Jacques Lanzmann, "L’Empire du silence"

…Quel spectacle si, la surface de la terre s’enlevant, nous distinguions le
travail immense que les eaux font en dessous … champs, bois, prairies, disparaissez. Laissez-nous voir le souverain laboratoire de la grande mère universelle, ses travaux ignorés pour animer, guérir, restaurer ses
enfants…
Jules Michelet, "Journal"

La vie,
un peu d’eau
quelques mots sur la langue
Bernard Noël, "Les Lettres Nouvelles"

L’eau est la chose la plus nécessaire à l’entretien de la vie, mais elle peut facilement être corrompue. Elle a donc besoin que la loi vienne à son secours. Voilà la loi que je propose : quiconque sera convaincu d’avoir corrompu l’eau d’autrui, eau de source ou eau de pluie, ou de l’avoir détournée, outre la réparation du dommage, sera tenu de nettoyer la source ou le réservoir conformément aux règles prescrites par les interprètes.
Platon, "Les Lois", Livre VIII

Elle est blanche et brillante, informe et fraîche, passive et obstinée dans son seul vice : la pesanteur, disposant de moyens exceptionnels pour satisfaire ce vice : contournant, érodant, filtrant (…) On pourrait dire que l’eau est folle, à cause de cet hystérique besoin de n’obéir qu’à sa pesanteur, qui la possède comme une idée fixe.
Francis Ponge, "Le Parti pris des choses"

J’ai toujours aimé l’eau passionnément, et sa vue me jette dans une rêverie délicieuse, quoique souvent sans objet déterminé.
Jean-Jacques Rousseau, Confessions, Livre XIII

Eau, tu n’as ni goût, ni couleur, ni arôme, on ne peut pas te définir, on te goûte, sans te connaître. Tu n’es pas nécessaire à la vie : tu es la vie.
Antoine de Saint-Exupéry, "Terre des hommes"

Il me semblait à la fin
de ne plus apercevoir que tous les états de l’eau,
l’eau neige, l’eau glace, l’eau vive,
l’eau flaque mirant l’eau nuée,
l’eau vapeur dont les volutes libérées se détordent,
se disloquent, s’attardent et se dissipent après nous.
Paul Valéry, "Variété II"

Parfois, visible et claire, rapide ou lente, elle se fuit avec un murmure de mystère qui se change tout à coup en mugissement de torrent rebondissant pour se fondre au tonnerre perpétuel des chutes écrasantes et éblouissantes, porteuses d’arcs-en-ciel dans la vapeur. Mais tantôt, elle se dérobe et s’achemine, secrète et pénétrante… ; puis elle s’apaise dans des lacs ensevelis qu’elle nourrit de longues larmes qui se figent en colonnes d’albâtre, …
Paul Valéry, "Louanges de l’eau"

Un fleuve ? En tout cas, c’est de l’eau
Qui coule à un joli niveau.
Bien sûr, c’est pas le Fleuve Jaune.
Mais c’est à nous, c’est tout vaudois,
Tandis que ces bons Genevois
N’ont qu’un tout petit bout du Rhône.
Jean Villard Gilles, "La Venoge"

Deçà, delà, en haut, en bas, courant, jamais elle ne connaît de quiétude, pas plus dans sa course que dans sa nature ; elle n’a rien à soi mais s’empare de tout, empruntant autant de natures diverses que sont divers les endroits traversés, comme le miroir accueille en soi autant d’images qu’il y a d’objets passant devant lui.
Léonard de Vinci, "Carnets"

L’eau reste le plus beau chemin
pour aller au plus profond de soi
Gilles Vigneault, dans "L’apprenti sage"

La rivière parfois
tremble se noue
pourtant jamais
elle ne se retourne
pour voir si on la suit.
Alexandre Voisard, "Sauver sa trace"




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Mots-clés

Glossaire

  • Interconnexion

    Pour assurer la continuité de l’approvisionnement de la population en eau potable de la meilleure qualité possible et en quantité suffisante, un distributeur doit disposer d’une ou plusieurs interconnexions de secours avec un ou plusieurs réseaux de distributeurs voisins. C’est l’une des solutions qui permet de garantir en permanence la sécurité d’une exploitation en cas d’accident ou en période de crise.

Mot d’eau

  • Jamais la même eau

    « Le cours de la rivière qui va jamais ne tarit, et pourtant ce n’est jamais la même eau. L’écume qui flotte sur les eaux dormantes tantôt se dissout, tantôt se reforme, et il n’est d’exemple que longtemps elle ait duré. Pareillement advient-il des hommes et des demeures qui sont en ce monde. » (Kamo no Chōmei, poète japonais, 1155-1216, "Hōjōki")


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