Selon le dernier rapport annuel de la coalition Dam Removal Europe qui milite pour la restauration de l’écoulement libre des cours d’eau, au moins 239 barrages de rivières ont été déconstruits en 2021 dans 17 pays européens. Nombre de ces obstacles artificiels devenus obsolètes étaient peu élevés mais un quart d’entre eux avaient tout de même une hauteur supérieure à 2 mètres. C’est en Espagne que ces actions de démantèlement sont les plus visibles : en une année ce pays a rayé pas moins de 108 barrages sur ses rivières. Mais ce type de renaturation des cours d’eau, qui reste un sujet très controversé dans de nombreux pays, s’inscrit aussi dans la stratégie de l’Union européenne dans sa lutte pour la protection de la biodiversité.
Supprimer les obstacles qui freinent le flux naturel des rivières et restaurer leur connectivité entre amont et aval est d’une actualité toujours plus grande dans bien des pays, lit-on dans le rapport publié par la coalition Dam Removal Europe [1]. Ces barrières jadis aménagées par l’homme pour divers usages (irrigation, force hydraulique, régulation, stockage, etc.) ont des impacts divers sur les écosystèmes des zones humides naturelles : elles modifient non seulement les régimes d’écoulement mais aussi la température de l’eau, freinent les flux de nutriments et le transport des sédiments, impactent les espèces animales et végétales et dégradent leurs habitats.
Le rapport note aussi que de toute façon, un jour ou l’autre, toutes ces barrières artificielles finissent par dépasser leur durée de vie utile, ne remplissent plus leurs fonctions économiques, et peuvent même générer des problèmes de sécurité. Il faut alors choisir : les réparer ou les démolir, la seconde solution étant généralement bien moins onéreuse. Ces déconstructions peuvent par contre avoir des effets bénéfiques sur l’esthétique des paysages riverains et sur les activités de loisirs, et surtout sur la migration facilitée des poissons qui reste l’un des principaux objectifs de ces suppressions de seuils en tous genres.
630’000 barrières déjà recensées
Les données sur le nombre de barrières obsolètes qui obstruent les cours d’eau européens sont certes incomplètes, mais on peut déjà s’en faire une idée plutôt convaincante grâce à l’Atlas élaboré par le projet AMBER piloté par l’Université de Swansea (Pays de Galles). L’inventaire et la cartographie encore provisoires qui ont pu être dressés recensent actuellement pas moins de 630’000 barrières dûment enregistrées dans les rivières d’Europe et quelque 400’000 autres points sont en cours de modélisation.
Comparé à ces chiffres, celui des 239 démolitions recensées par la coalition Dam Removal Europe en 2021 peut paraître dérisoire. Mais la tendance se confirme et va dans le sens de l’ambitieux objectif de la Commission européenne de restaurer l’écoulement libre d’au moins 25’000 km de rivières d’ici 2030. On estime à Bruxelles que cet objectif est tout à fait réalisable à travers la suppression de barrages, de seuils et autres digues dont le maintien ne se justifie plus, ainsi que la restauration d’espaces inondables et de zones humides. (bw)