Le canal de Hagneck
C’est l’ouvrage-clé de la première correction : pour dévier l’Aar dans le lac de Bienne, il fallait fournir à un cours d’eau un lit qui n’existait pas jusque-là et, depuis Aarberg, aménager de toutes pièces un canal de 8 kilomètres de long. L’excavation s’est faite uniquement à coup d’explosifs et à la pelle, sans machines. Le dernier tronçon du canal de Hagneck a dû être creusé, sur 900 mètres de long et une trentaine de profondeur, à travers une crête de molasse, cette roche sédimentaire caractéristique du Plateau suisse. Une partie des matériaux a été utilisée pour les remblais, l’autre (plus de deux millions de mètres cubes) a été emportée par les eaux de l’Aar vers le lac après l’ouverture du canal en août 1878.
Entre 2010 et 2015, le canal de Hagneck a été entièrement rajeuni. D’une part, les digues, devenues partiellement perméables, demandaient à être restaurées, renforcées et relevées ; d’autre part, le cours d’eau manquait singulièrement d’habitats naturels et montrait de sérieux déficits écologiques. Ainsi rénové, ce canal est désormais paré pour faire face à une crue centennale et offrir à ses riverains un supplément de protection contre d’éventuelles inondations.
À noter aussi qu’en 1899 l’embouchure du canal de Hagneck avait été dotée d’une centrale hydroélectrique, l’une des plus anciennes de Suisse. En 2015 elle a été remplacée par une nouvelle usine plus performante, conçue également pour protéger contre les crues et pour satisfaire à des impératifs écologiques comme la migration du poisson ou le développement d’une forêt alluviale [1].
Les canaux de la Broye et de la Thielle
Deux rivières alimentent naturellement les trois lacs : la Broye, qui prend sa source dans les Préalpes fribourgeoises et traverse le lac de Morat pour se jeter ensuite dans celui de Neuchâtel, et la Thielle, venant de la plaine de l’Orbe, qui traverse les lacs de Neuchâtel et de Bienne avant de rejoindre l’Aar. Pour améliorer la connectivité entre les trois plans d’eau, mais aussi pour que ces rivières intermédiaires bénéficient d’une largeur et d’une profondeur propices à la navigation, des travaux furent entrepris pour supprimer leurs méandres, leur donner un tracé plus ou moins rectiligne et abaisser leurs lits. Au final, et grâce à ces deux canaux de la Broye et de la Thielle, respectivement longs de 9 et 8,5 kilomètres, le système de vases communicants pouvait commencer à jouer son rôle et servir de zone tampon capable en principe d’absorber les crues.
Le canal de Nidau-Büren
Jusqu’à la première correction des eaux du Jura, le seul exutoire du lac de Bienne, à Nidau, était la Thielle qui rejoignait l’Aar non loin de Büren, une dizaine de kilomètres en aval. Lorsque celle-ci a été détournée vers le lac, il était impératif d’augmenter en conséquence son débit de sortie. Il fut alors décidé d’ouvrir un nouvel émissaire parallèle à la rivière sur environ 2 kilomètres, de construire un large canal de 12 kilomètres entre Nidau et Büren et de court-circuiter les grands méandres de l’Aar. Comme cet aménagement avait rapidement entraîné l’abaissement du niveau du lac, un barrage de régulation fut installé provisoirement du côté de Nidau, remplacé en 1887 par un barrage à quatre passes. (bw)