« Appel du Rhône. Pour la reconnaissance d’une personnalité juridique du Rhône. » C’est sous la forme d’un manifeste que l’association id-eau a décidé de lancer une campagne de mobilisation citoyenne et transnationale pour donner à ce fleuve, de son glacier suisse à son delta français, les moyens de défendre son intégrité devant les tribunaux et de le mettre de façon préventive à l’abri d’activités destructrices.
Cet Appel du Rhône, a expliqué Frédéric Pitaval - l’un des concepteurs du grand aquarium Aquatis de Lausanne et directeur de l’association id-eau - lors du lancement officiel de cette action collective le 18 septembre 2020 [1], « c’est la possibilité et le moyen d’interroger nos modes de vie, notre modèle économique et notre résilience. Grâce au fleuve et à cette ressource eau, cela nous permet de nous questionner sur toutes les problématiques liées à nos sociétés : changement climatique, santé publique, extinctions de masse, conditions de travail, condition de la femme, mobilité, énergie. Bref : l’eau est au cœur de tout. »
La démarche de l’association id-eau repose essentiellement sur trois grands axes :
– le constat tout d’abord que le droit actuel ne permet pas de faire face à la crise climatique et écologique, car il n’est pas pensé en termes de préservation de la nature ou d’anticipation de possibles dégradations, mais uniquement en termes de réparation des dommages causés ;
– la conviction ensuite que seules des mobilisations citoyennes et des énergies collectives pourront créer une dynamique capable de faire évoluer le droit et de forger des outils légaux contraignants pour la protection des écosystèmes ;
– l’exemplarité enfin de pionniers qui depuis des années militent pour la reconnaissance des droits de la nature [2] et qui l’ont obtenue entre autres pour des fleuves comme le Whanganui en Nouvelle-Zélande, l’Atrato en Colombie et le Vilcabamba en Équateur.
Pour Frédéric Pitaval, il s’agit d’apporter cette réflexion nouvelle autour des cours d’eau européens et du Rhône en particulier : « Il y a urgence. Il est grand temps de reconnaître notre interdépendance avec le vivant, de créer des passerelles entre les disciplines pour aborder les questions de la crise écologique à sa juste échelle, de questionner notre droit pour nous protéger et pour protéger les générations futures. »
Concrètement, l’association id-eau invite le public intéressé par cette problématique à souscrire à son appel et se joindre à cette mobilisation citoyenne, à soutenir les actions en vue de la reconnaissance du Rhône en tant qu’entité naturelle jouissant d’une personnalité juridique et à devenir acteur de la sensibilisation aux droits de la nature. Plusieurs associations de défense de l’environnement ont d’ores et déjà signé cet appel qui a recueilli plusieurs dizaines de signatures individuelles, en tête desquelles on trouve le nom de la juriste française Valérie Cabanes [3], spécialiste de droit international et personnellement engagée pour la reconnaissance des crimes contre l’environnement. (bw)