Le 2 février 1971, une nouvelle convention internationale était adoptée dans la ville iranienne de Ramsar avec pour objectif la conservation et l’utilisation rationnelle des zones humides et de leurs ressources. Depuis lors, la date du 2 février est placée chaque année sous le signe de la Journée des zones humides. La liste des sites protégés labellisés Ramsar ne cesse de s’allonger et en compte à ce jour 2416 répartis sur tous les continents. [1] Le 2 février 2021, c’est-à-dire 50 ans plus tard, jour pour jour, après la naissance de cette convention, la France a officiellement annoncé l’agrandissement du site des « Tourbières et lacs de la Montagne jurassienne » : d’une superficie de plus de 12’000 hectares, cette zone protégée compte désormais pas moins de 18 lacs et 125 tourbières. Cela représente plus d’un tiers de la surface tourbeuse recensée dans l’ensemble du massif jurassien franco-suisse.
Depuis 2003, il existait déjà un site Ramsar dans le massif du Jura français : le « Bassin du Drugeon », du nom de la rivière qui le traverse. Cette zone protégée vient donc d’être élargie, doublant sa superficie : elle s’étend désormais entre les villes de Pontarlier et de Saint-Claude. Elle s’est enrichie des vallées du Haut-Doubs et de l’Orbe et de la vallée de Chapelle-des-Bois et Bellefontaine. Cet élargissement résulte de la volonté affichée par 52 communes du Haut-Jura et du Haut-Doubs de valoriser leur patrimoine naturel de manière collective et de le faire reconnaître à l’échelon international. [2]
Ce nouveau site, explique Tobias Salathé, délégué pour l’Europe de la Convention de Ramsar, a en effet quelque chose d’exemplaire dans le sens où il protège des écosystèmes qui sont restés naturels, qui fonctionnent encore, qui retiennent l’eau et la purifient, qui captent le gaz carbonique de l’atmosphère et stockent le carbone dans la tourbe. Cette approche intégrée peut donner des idées à d’autres pays. [3]
Les « Tourbières et lacs de la Montagne jurassienne », disent les gestionnaires du nouveau site Ramsar (le Parc naturel régional du Haut-Jura et l’EPAGE Haut-Doubs Haute-Loue), représentent le plus grand ensemble français de complexes de bas-marais alcalins et de haut-marais de montagne. Les caractéristiques de ces milieux (tourbe + montagne + connections hydrologiques) montrent que les espèces végétales et animales y sont « super-adaptées » mais qu’elles sont néanmoins sous la menace des activités humaines et des changements climatiques. Préserver un réseau dense et connecté de ces milieux aquatiques et humides, tourbeux ou non, est la seule et unique façon de garantir le maintien de ces espèces.
Autres atouts et défis : maintenir l’équilibre écologique des tourbières, c’est conserver un important stock de carbone dans le sol et éviter qu’il ne soit rejeté dans l’atmosphère sous forme de gaz à effets de serre. Les milieux humides jouent par ailleurs un rôle-clé de tampon hydrologique lors d’évènements extrêmes comme les crues et les sécheresses. Quant aux tourbières, lacs et petits cours d’eau, on sait depuis longtemps qu’ils constituent, avec les nombreuses forêts qui les entourent, un patrimoine paysager emblématique des vallées jurassiennes. De quoi nourrir l’imaginaire de leurs habitants comme de celles et ceux qui s’y promènent.