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18 juin 2012.

Vidange chasse au barrage de Verbois

Vidange du barrage de Verbois et chasse du Rhône genevois. Les (...)

Vidange du barrage de Verbois et chasse du Rhône genevois. Les données du problème : concilier protection de la nature, production d’énergie, sécurité des biens et des personnes

Chaque année, quelque 350’000 m3 de sédiments apportés par l’Arve, se déposent dans la retenue de Verbois. Depuis plus d’un siècle, leur gestion s’est faite par le biais de chasses-vidanges (voir schémas ci-contre), d’abord sur la centrale de Chèvres (aujourd’hui disparue) puis sur le barrage de Verbois qui en est à sa 20e vidange. Au moment de sa mise en service en 1943, celui-ci bénéficiait d’une retenue de 15 millions de m3 d’eau. En 2012, il n’en restait plus que les deux tiers : depuis la dernière vidange en 2003, ce ne sont pas moins de 3,4 millions de m3 de sédiments qui se sont accumulés. La chasse-vidange de 2012 avait pour objectif d’en évacuer la moitié, de manière à dégager le lit du fleuve et assurer la sécurité des riverains en cas de crues.

Photos © aqueduc.info




0 20 Il y a au total 24 photos, cette page en affiche 4.

1 Le problème Le confluent Rhône-Arve et le quartier de la Jonction : la rivière alimentée par le massif du Mont-Blanc déverse chaque année environ 350'000 m3 de sédiments dans le Rhône, épuré dans sa traversée du Léman, et dans la retenue de Verbois. Leur accumulation diminue la capacité du barrage et de sa production hydroélectrique, et augmente le risque d'inondations en cas de grosses crues.
2 La vidange, 9 juin 2012 Les vannes de fond du barrage de Verbois sont progressivement ouvertes pour provoquer l'abaissement de la retenue. Cette opération commence lentement (environ 15 cm par heure) afin de limiter l'impact environnemental sur les lagunes, embouchures, roselières, et autres milieux connectés au Rhône
3 La chasse, 12 juin 2012 Ouverture des vannes sur le barrage du Seujet (qui régule aussi le niveau du Léman) pour augmenter rapidement le débit du Rhône et provoquer un fort courant qui emporte alors une partie des limons déposés dans le lit du fleuve
4 Verbois, en temps normal Au moment de sa mise en service en 1943, le barrage de Verbois bénéficiait d'une retenue de 15 millions de m3 d'eau. En 2012, on estimait qu'elle en avait perdu un bon tiers du fait de l'accumulation des sédiments amenés par l'Arve.
5 Verbois, 9 juin 2012 Quelques heures après le début de l'abaissement de la retenue, les premiers bancs de limon apparaissent. Du côté de l'usine d'incinération proche du barrage, les barges qui depuis la Jonction acheminent quotidiennement par le fleuve les deux tiers des ordures ménagères genevoises, sont hors service.
6 Verbois, 13 juin 2012 L'abaissement de la retenue est au plus bas : au barrage, le niveau d'eau se situe environ 15 mètres en-dessous de la cote normale. Cet abaissement sera maintenu plusieurs jours encore, le temps de procéder au remplacement des grilles de protection des turbines de l'ouvrage.
7 Verbois, le barrage, toutes vannes ouvertes Travaux de maintenance obligent, toute la zone du barrage a été sécurisée et interdite à la circulation. Mais, même de loin, on voit bien que le Rhône est au plus bas et qu'il ne reste plus grand-chose de l'habituelle hauteur de chute du fleuve à cet endroit.
8 Le Rhône, en aval du barrage Au-delà de Verbois, le fleuve, couleur de limons grisâtres, poursuit son cours vers d'autres obstacles, et d'autres barrages qui, à Chancy-Pougny et surtout à Génissiat, connaissent le même genre de problèmes sédimentaires. La Compagnie Nationale du Rhône qui gère l'ensemble des ouvrages sur le tronçon français du fleuve a mis en œuvre d'importantes mesures d'accompagnement pour limiter l'impact de la vidange suisse.
9 Un flot mortel pour la faune aquatique Grâce aux pêcheurs, quelques centaines de poissons, alevins, écrevisses et autres individus de la faune aquatique ont pu être sauvés du désastre avant la chasse du Rhône. Pour des milliers d'autres, barbeaux, gardons, tanches, brochets, etc., cette opération aura été mortelle. Brutalement emportés par la violence du courant, ou asphyxiés, les branchies pleines de ces denses quantités de sédiments que le fleuve s'est soudainement réappropriées.
10 Le Rhône, au pont de Peney, en temps normal Comme un paysage de carte postale, sous un soleil printanier …
11 Le Rhône, au pont de Peney, 15 juin 2012 Cela aura sans doute été le 'panorama naturel' le plus fréquenté et le plus photographié par les Genevois en ce mois de juin 2012. Avec peut-être un petit pincement de cœur pour les natifs du lieu qui ont connu le Rhône d'avant le barrage.
12 Vestiges de l'ancien pont de Peney La construction du barrage de Verbois en 1942 ayant pour conséquence l'élargissement du Rhône, il fallut construire un nouveau pont. Le précédent, un ouvrage métallique datant de 1895, fut démoli. La vidange de la retenue fait émerger ce qui reste de ses fondations, en rive gauche
13 En aval du pont de Peney, en temps normal Le Rhône, en cet endroit, ressemble à n'importe quel plan d'eau et ses rives y sont plutôt accueillantes.
14 En aval du pont de Peney, 09 juin 2012 Ce jour-là, le commencement de la vidange surprend les cygnes, foulques et colverts. Heureusement, l'abaissement des eaux se faisant au début plus lentement que lors de précédentes chasses, nombre d'oiseaux aquatiques auront le temps de trouver quelque refuge, non sans abandonner ici et là une couvée en cours ou l'un ou l'autre caneton égaré.
15 Bras de Peney-Dessous, 15 juin 2012 Dans cette anse, aménagée lors de la construction du barrage de Verbois, le Rhône recouvre normalement ce qui était jadis le bas d'un vallon alimenté par le Nant d'Avril. En hiver, ce bras du fleuve sert de refuge à de nombreux oiseaux, migrateurs ou non. Ce jour-là, sur ces bas-fonds dénudés, nulle trace de vie. Les oiseaux n'y trouvent plus la moindre nourriture.
16 En amont du pont de Peney, 11 juin 2012 La chasse du Rhône et de fortes pluies ont complètement transformé le paysage. Des sillons se creusent dans les limons, de petites falaises apparaissent un instant avant de s'effondrer, drainées par le fleuve noirâtre et boueux. Spectacle lunaire, disent certains. On se croirait au Mont Saint-Michel à marée basse, commentent d'autres.
17 Limons du Rhône, univers informe Au fur et à mesure qu'elles se retirent, les eaux du fleuve laissent à découvert une improbable cartographie boueuse. On y voit alors, comme dans un atlas en relief, feuilleté à vol d'oiseau, toutes sortes de massifs plus ou moins asséchés et de dépressions humides. Surgissent dans l'imaginaire autant de terres inconnues à découvrir mais où, pourtant, il serait bien aventureux de poser le pied …
18 Le Rhône, en aval des ponts de Chèvres, en temps normal N'était-ce le bruit de fond continu des véhicules qui transitent sur le pont autoroutier, l'endroit serait idyllique. Il est d'ailleurs bien fréquenté par les promeneurs qui, en cet endroit, profitent aussi d'une passerelle bienvenue. C'est ici (sur la gauche) qu'avait été construite, à la fin du 19e siècle, l'une des premières grandes usines hydroélectriques d'Europe. Elle fut démolie lorsqu'en aval le barrage de Verbois fut mis en service.
19 Le Rhône, en aval des ponts de Chèvres, 10 juin 2012 Le même endroit, par temps de vidange, a perdu tout son attrait. Il a même pris ce jour-là un petit air sinistre. Les promeneurs romantiques ont cédé leur place à quelques curieux venus vérifier de leurs propres yeux ce qu'ils ont entendu dire de cette fameuse chasse-vidange. Et qui ne comprennent pas vraiment pourquoi l'on s'obstine à poursuivre ce genre de pratique qui a toutes les apparences d'un désastre.
20 Le Rhône, aux ponts de Chèvres, 10 juin 2012 Sans pudeur aucune, le pont de béton et la passerelle métallique dévoilent leurs jambes et leurs dessous. Mais le charme n'y est pas. Une chasse-vidange n'est pas faite sur le modèle des opérations de séduction.

Infos complémentaires



Le tronçon (env. 12 km) du Rhône genevois concerné par l’opération de vidange chasse, du barrage du Seujet, en ville de Genève, au barrage de Verbois, entre les communes d’Aire-la-Ville et de Russin (carte de base © swisstopo)


 Une telle opération sur un fleuve transfrontalier nécessite une étroite collaboration entre les autorités suisses et françaises et entre les entreprises qui gèrent les différents ouvrages aménagés sur le Rhône, en particulier les Services Industriels de Genève (Seujet et Verbois), la Société des Forces Motrices de Chancy-Pougny (barrage franco-suisse en aval) et la Compagnie Nationale du Rhône qui exploite le barrage de Génissiat (en France). Il a fallu près de 2 ans pour mener à terme les différentes procédures d’autorisation, techniques et administratives.

 Les Services Industriels de Genève (SIG) ont décidé cette année de coupler l’abaissement de la retenue avec le remplacement des grilles de protection des turbines du barrage de Verbois dont l’usure et la corrosion ne permettent plus de garantir leur fonction de filtre. À l’avenir, les nouvelles grilles pourront être entretenues ou remplacées sans abaissement du plan d’eau. De ce fait, il avait été préalablement décidé de maintenir la retenue à son plus bas niveau pendant 7 jours au lieu des 3 jours habituels.

 Comme ces travaux de maintenance ne pouvaient être faits qu’à basses eaux, il fallait aussi réduire pendant plusieurs jours les débits du Rhône au barrage du Seujet. Le niveau du Léman s’est donc régulièrement élevé durant cette période, jusqu’à près de 40 centimètres au-dessus de son niveau annuel moyen (372.05 msm). Les SIG avaient certes anticipé cette montée du lac en le maintenant à une cote relativement basse, mais de mauvaises conditions météorologiques et de gros débits de l’Arve ont pendant 2 ou 3 jours quelque peu compliqué la gestion de ces différents paramètres hydrographiques.

 Les impacts des chasses-vidanges sur l’écosystème du Rhône sont très importants. C’est ce qui avait d’ailleurs incité les associations de protection de l’environnement à réclamer, et obtenir après 2003, un moratoire qui a débouché sur une suspension pendant neuf ans de cette pratique jusqu’alors triennale. Concrètement, chaque opération se traduit par l’asphyxie de milliers de poissons dans un fort courant chargé de sédiments, d’autres sont piégés dans des plans d’eau connexes, de nombreux nids d’oiseaux aquatiques sont détruits ou emportés, des nichées sont séparées des oiseaux adultes, les castors encourent des risques de prédation, des fronts de roselières s’écroulent, etc.

 Les services de l’État genevois et les SIG ont tenté, autant que possible, de réduire ces impacts quasi catastrophiques grâce notamment à des pêches préventives, à l’aménagement de zones refuges, et à l’alimentation de lagunes en eau potable pour compenser l’évaporation et conserver une concentration d’oxygène viable pour la faune piscicole.

 En se vidant, la retenue de Verbois fait aussi apparaître une multitude d’objets jetés dans le fleuve. La chasse emporte les matériaux les plus légers, bouteilles, cannettes, plastiques, bois, meubles, mais, dans ce Rhône-poubelle la baisse des eaux va mettre à découvert plusieurs tonnes de ferraille, dont des voitures (deux ont été repêchées), des deux-roues, des caddies, et même, rapporte la Tribune de Genève, onze coffre-forts, tous retrouvés au même endroit.

 À court et à moyen termes, les SIG ont la volonté de développer d’autres modes de gestion de la retenue de Verbois qui rendent possible l’évacuation des sédiments sans provoquer le désastre environnemental que l’on connaît aujourd’hui. Il reste cependant encore trop d’inconnues qui empêchent, pour le moment, de définir une stratégie précise. Dans un premier temps, il est envisagé de procéder entre 2015 et 2017, à un abaissement partiel du plan d’eau d’environ 4 mètres.

 Au final, le Canton de Genève et la Préfecture de l’Ain se disent satisfaits de ces opérations de vidange chasse qui se sont "globalement bien déroulées", ainsi que de la qualité de la collaboration entre autorités et exploitants des deux côtés de la frontière. Le groupe de coordination technique en charge du suivi des chasses doit maintenant rédiger un bilan final détaillé et en publier les conclusions d’ici quelques mois. (*)

(Sources : État de Genève, Direction générale de l’eau
et Services Industriels de Genève)

(*) P.S. Ce bilan final a été publié en avril 2013.
Voir l’article aqueduc.info à ce sujet



La retenue du Rhône au barrage de Verbois
une semaine après la fin de la vidange chasse

Avis de danger sur les rives
du Rhône genevois
(photos aqueduc.info)

Calendrier effectif des chasses du Rhône 2012

4 juin
Abaissement de la retenue de Génissiat (France)
9 juin
Abaissement de la retenue de Verbois, puis de celle de Chancy-Pougny
12 juin
Ouverture des vannes au barrage du Seujet (Genève) et début de la chasse du Rhône, opération rendue difficile en raison de fortes crues des affluents du fleuve. Conséquence : un jour plus tôt que prévu, il est mis fin aux opérations d’accompagnement sur le Rhône français et la retenue de Génissiat est remontée.
15 juin
Remontée de la retenue de Chancy-Pougny à son niveau normal
21 juin
Début de la remontée à Verbois avec deux jours de retard sur le calendrier annoncé, en raison d’un problème imprévu survenu sur le chantier du renouvellement des grilles du barrage (grosse accumulation de boues non chassées).
22 juin
La retenue de Verbois retrouve son niveau d’exploitation normal.


Le comment d’une opération très spectaculaire


Niveau de la retenue au moment de la construction du barrage

Au fil des ans, les sédiments s’accumulent, la capacité du barrage de Verbois diminue et les crues augmentent les risques d’inondations

La vidange
Les vannes de fond du barrage de Verbois sont ouvertes, ce qui provoque un abaissement complet de la retenue d’eau et permet au Rhône, durant quelques jours, de retrouver son écoulement naturel

La chasse
L’ouverture des vannes du barrage du Seujet, en amont de la retenue de Verbois, provoque une brusque augmentation du débit du Rhône : une partie des limons et autres sédiments accumulés dans le lit du fleuve transite ainsi rapidement vers l’aval


La masse des sédiments retrouve un niveau acceptable, les vannes de fond du barrage de Verbois sont refermées et la retenue d’eau retrouve peu à peu son niveau normal.

(Schémas réalisés sur la base de graphismes des Services Industriels de Genève)


Niveaux du lac Léman durant l’opération de chasse-vidange
01 juin : 371,70 msm
09 juin : 371,97 msm
13 juin : 372,16 msm
22 juin : 372,42 msm
30 juin : 372,29 msm

Les niveaux du lac Léman, fixés par un accord intercantonal datant de 1884, sont gérés au barrage du Seujet, en ville de Genève. Le niveau maximal normal est de 372.30 mètres, de juin à décembre, et le niveau minimal de 371.60 mètres, de mars à avril.


En savoir plus sur les sites
 de l’État de Genève
 des Services Industriels de Genève
 de la Compagnie Nationale du Rhône (France) (PDF, Foire aux questions)
 aqueduc.info

Mots-clés

Glossaire

  • Interconnexion

    Pour assurer la continuité de l’approvisionnement de la population en eau potable de la meilleure qualité possible et en quantité suffisante, un distributeur doit disposer d’une ou plusieurs interconnexions de secours avec un ou plusieurs réseaux de distributeurs voisins. C’est l’une des solutions qui permet de garantir en permanence la sécurité d’une exploitation en cas d’accident ou en période de crise.

Mot d’eau

  • Jamais la même eau

    « Le cours de la rivière qui va jamais ne tarit, et pourtant ce n’est jamais la même eau. L’écume qui flotte sur les eaux dormantes tantôt se dissout, tantôt se reforme, et il n’est d’exemple que longtemps elle ait duré. Pareillement advient-il des hommes et des demeures qui sont en ce monde. » (Kamo no Chōmei, poète japonais, 1155-1216, "Hōjōki")


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