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3 juin 2009.

Quel avenir pour l’énergie bleue ?

EDITO JUIN 2009 Dans sa dernière livraison, le magazine de (...)

EDITO JUIN 2009

Dans sa dernière livraison, le magazine de l’Office fédéral de l’environnement s’interroge sur les scénarios d’avenir pour l’approvisionnement énergétique de la Suisse. Une occasion de rappeler que l’énergie hydraulique couvre actuellement quelque 55 % des besoins en électricité de ce pays et un peu plus de 13 % de l’ensemble de ses besoins énergétiques.

Mais qu’adviendra-t-il, dans deux ou trois décennies, de ce potentiel de force bleue, compte tenu de la nécessité de sauvegarder les paysages et les écosystèmes aquatiques et de faire face aux risques et incertitudes des changements climatiques ? Et quelles réponses apporter dès aujourd’hui à ces différents enjeux ?

On se souvient qu’il y a trois ans la Fédération suisse de pêche et différentes organisations écologistes avaient récolté pas moins de 160’000 signatures à l’appui de l’initiative populaire “Eaux vivantes”. Celle-ci réclame la renaturation des cours d’eau perturbés par de nombreux aménagements urbains et industriels, mais aussi le respect par les exploitants de centrales hydroélectriques des normes légales qui définissent les débits d’eau à l’aval de ces installations.

Cette initiative n’avait pas convaincu le gouvernement fédéral qui estime qu’elle pénaliserait la production d’énergie hydraulique et mettrait en danger la sécurité de l’approvisionnement national en électricité. Mais l’idée de chercher un meilleur équilibre entre les impératifs de la protection des eaux et ceux de leur exploitation à des fins énergétiques a tout de même fini par trouver quelques échos favorables au sein du Parlement. Un contre-projet est en train d’y être élaboré.

Aujourd’hui, rappelle le magazine « Environnement », la Suisse exploite la presque totalité des cours d’eau potentiellement utiles à la production d’électricité. Non sans graves conséquences écologiques : les barrages morcèlent les habitats des espèces aquatiques et entravent leurs migrations saisonnières, modifient le système de charriage des sédiments, provoquent d’importantes variations des débits d’eau en fonction de la demande d’électricité.

Certes, la loi sur la protection des eaux en vigueur depuis 1992 exige des débits résiduels convenables. Mais ces dispositions ne concernent les centrales électriques qu’à partir du moment où elles renouvellent leur concession. Ce qui, pour certaines d’entre elles, renvoie carrément aux calendes grecques la mise en œuvre de ces normes qui, si elles étaient appliquées, entraîneraient dit-on une baisse de 6 à 7 % de la production hydroélectrique.

Les incertitudes sur l’évolution du climat n’arrangent pas non plus les affaires des électriciens qui s’inquiètent des pronostics météorologiques à long terme, lesquels font certes état d’une hausse des précipitations en hiver mais aussi des sécheresses en été. Selon des études menées dans les laboratoires de l’École polytechnique fédérale de Lausanne, cette modification du régime des précipitations aurait pour conséquence, d’ici au milieu du siècle, de faire également reculer la production hydroélectrique de quelque 7 pour cent.

Face à ces contraintes écologiques et climatiques et aux déficits énergétiques qu’elles induisent, un défi s’impose : produire plus avec moins d’eau. On souligne, du côté de l’Office fédéral de l’environnement, que l’efficacité des usines hydroélectriques peut être fortement augmentée. Soit par l’optimisation et l’extension des installations existantes, soit par la construction de nouvelles centrales offrant le meilleur taux possible de rentabilité. En clair : cela voudrait dire qu’il est possible dans les deux décennies à venir d’accroître la production annuelle d’énergie hydraulique de quelque deux milliards de kilowattheures, soit environ 6 à 7% de plus qu’en l’an 2000.

On est sur la bonne voie, assure-t-on à Berne. La célèbre petite phrase prononcée il y a plus d’un siècle par le banquier et politicien bâlois Carl Koechlin est toujours d’actualité : « Nous devrions parvenir un jour à ce qu’aucun ruisseau ne descende des montagnes sans profiter au bien-être national ». Encore faut-il s’entendre sur ce que bien-être veut dire en termes de développement durable.

Bernard Weissbrodt


 L’article de Hansjakob Baumgartner : « Force hydraulique : Les limites de l’or bleu », paru dans le magazine Environnement (02/2009), est disponible sur le site de l’Office fédéral de l’environnement (OFEV)




Infos complémentaires

Le chantier de la centrale
de Rheinfelden sur le Rhin
(photo energiedienst.de extraite du magazine Environnement)


:: Une reconstruction exemplaire :
la centrale de
Rheinfelden (Argovie)

La centrale de Rheinfelden, sur le Rhin, est la plus ancienne des grandes centrales européennes au fil de l’eau d’Europe. Elle produit de l’électricité depuis 1898. Un canal conduit une partie de l’eau du fleuve vers l’ancien bâtiment des machines situé en rive droite.

Une nouvelle centrale est en train d’être construite à la hauteur du barrage. Le nouveau bâtiment des machines est déplacé sur la rive gauche, à proximité du barrage. L’ancien canal sera transformé en cours d’eau de contournement et sera aménagé d’une manière proche de l’état naturel avec une végétation alluviale, des îlots pouvant héberger des oiseaux, des zones d’eau peu profondes et des bancs de gravier qui remplaceront les échelles à poisson.

Le plan d’eau de la retenue sera surélevé de 1,40 m et avec de nouvelles turbines plus performantes, la capacité de production électrique de la centrale sera trois à quatre fois supérieure à celle d’aujourd’hui.

(Informations : Office fédéral de l’environnement / Association des entreprises électriques suisses)

Modélisation de la nouvelle centrale de Rheinfelden (photo poweron.ch) extraite du magazine Environnement

 Voir le reportage sur la construction de la centrale de Rheinfelden sur le site www.poweron.ch de l’Association des entreprises électriques suisses.

Mots-clés

Glossaire

  • Interconnexion

    Pour assurer la continuité de l’approvisionnement de la population en eau potable de la meilleure qualité possible et en quantité suffisante, un distributeur doit disposer d’une ou plusieurs interconnexions de secours avec un ou plusieurs réseaux de distributeurs voisins. C’est l’une des solutions qui permet de garantir en permanence la sécurité d’une exploitation en cas d’accident ou en période de crise.

Mot d’eau

  • Jamais la même eau

    « Le cours de la rivière qui va jamais ne tarit, et pourtant ce n’est jamais la même eau. L’écume qui flotte sur les eaux dormantes tantôt se dissout, tantôt se reforme, et il n’est d’exemple que longtemps elle ait duré. Pareillement advient-il des hommes et des demeures qui sont en ce monde. » (Kamo no Chōmei, poète japonais, 1155-1216, "Hōjōki")


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