Le défi de la qualité
L’eau potable est notre principale denrée alimentaire, ont d’emblée rappelé les premiers intervenants de ce séminaire auquel participaient quelque 70 représentants de communes et de distributeurs principalement vaudois. Autrement dit : garantir la qualité et l’hygiène de l’eau potable est une priorité de santé publique, et donc, du même coup, une obligation des services qui la fournissent aux consommateurs.
Nul distributeur n’étant censé ignorer la loi, il n’était donc pas inutile de renvoyer d’abord l’auditoire aux principes fondamentaux à respecter si l’on veut garantir la meilleure qualité possible des eaux potables, de la source commune au robinet domestique. En Suisse, cela passe par différents niveaux de législation (lois fédérales et cantonales, règlements communaux) et touche à différents domaines (protection de l’environnement, santé publique, normes techniques, etc.).
Concrètement, il s’agit tout à la fois de délimiter des zones de protection autour des captages, de disposer d’ouvrages et d’installations de traitement, de stockage et d’adduction conformes aux normes, d’en assurer régulièrement le contrôle et l’entretien par du personnel qualifié, de veiller – par des mesures obligatoires d’autocontrôle – à ce que les exigences légales concernant la qualité de l’eau soient respectées à toutes les étapes de son traitement et de sa distribution, et d’en tenir informés les usagers au moins une fois par année.
Au passage, il est rappelé aussi que l’eau potable doit être salubre à l’endroit où elle est mise à disposition du consommateur, que les propriétaires sont responsables des installations de distribution dans leur immeuble et qu’il est donc préférable, pour leur entretien, de faire appel là aussi à des professionnels qualifiés.
À des coûts raisonnables
Si la préservation de la qualité de l’eau représente un immense défi pour les autorités communales, il en est un autre, à long terme, qu’elles doivent aussi relever : distribuer l’eau à des coûts raisonnables et à performance égale, tout en investissant régulièrement dans le renouvellement des installations et en faisant face aux changements climatiques.
De ce point de vue, on notera que le Canton de Vaud, qui vient d’adapter sa législation aux procédures découlant du droit fédéral, a décidé de revoir également les modalités de tarification de l’eau. Les communes vaudoises disposent cependant d’un délai de trois ans pour mettre à jour leurs propres règlements.
"Prix de vente de l’eau", "finance annuelle et uniforme d’abonnement", "prix de location pour les appareils de mesure" : ces diverses formulations qui relèvent du droit privé ont été biffées de la nouvelle loi vaudoise et ont toutes été converties en "taxes" (de consommation, d’abonnement, de location). Cela a pour conséquence légale, pour les communes et les syndicats intercommunaux de distribution, d’attribuer à l’autorité législative la compétence première en matière de tarification de l’eau, même si elle peut la déléguer au pouvoir exécutif à condition de préciser sa marge de manœuvre.
La nouvelle loi établit par ailleurs le principe de la couverture des frais, de l’autofinancement des installations principales, et donc, implicitement, du consommateur-payeur : cette disposition exclut à la fois de recourir à l’impôt pour financer le compte de l’eau et de prélever une part de ses recettes pour financer d’autres tâches dévolues à la commune.
Du côté de la SSIGE, on se veut très attentif aux problèmes de financement de la distribution d’eau potable. Les distributeurs sont dans ce domaine au bénéfice d’un mandat public et se doivent de pratiquer la plus grande transparence possible dans ce qui est, somme toute, une situation de monopole naturel. L’association faîtière a d’ailleurs émis, à leur intention, un certain nombre de recommandations pour le calcul de leurs coûts et préconise, comme règle fondamentale, que les taxes de base couvrent au moins 50 à 80% des coûts globaux.
Il faut savoir à ce propos que la tendance à la baisse de la consommation d’eau, enregistrée depuis plusieurs années, entraîne automatiquement une baisse des revenus des distributeurs qui risquent, à long terme, de se retrouver dans des impasses financières. D’où l’importance d’assurer des recettes qui ne dépendent pas de façon disproportionnée de cette consommation, de déterminer les coûts effectifs et de pratiquer un mode de tarification de l’eau potable qui prenne en compte la totalité des coûts réels d’exploitation.
Interconnecter les réseaux
"L’interconnexion intelligente" est l’autre formule-clé du moment, mise par ailleurs en évidence dans l’exposition présentée au grand public dans les halles du Comptoir suisse (voir ci-contre). Entendez par là la décision prise par des collectivités voisines d’exploiter en commun leurs ressources en eau et d’interconnecter leurs réseaux.
Nul besoin de longues explications pour comprendre les avantages de cette manière de faire. Elle permet en effet de
– garantir l’approvisionnement constant de toutes les régions du pays, y compris lors de périodes prolongées de sécheresse
– interconnecter des infrastructures performantes et capables de mieux couvrir ponctuellement les pics de demande d’eau
– créer des synergies en matière d’entretien et d’autocontrôle professionnel des installations
– générer des économies d’échelle et d’améliorer la rentabilité des investissements même si, dans un premier temps, ces interconnexions entraînent d’inévitables surcoûts d’aménagements.
De toute évidence – faut-il rappeler qu’en Suisse la distribution de l’eau potable est dans la plupart des cas directement gérée par les communes ? – les autorités communales ont aujourd’hui, dans ce domaine et plus que jamais, de très lourdes responsabilités qui ne s’accommodent ni de l’amateurisme ni de l’improvisation. Les tâches des distributeurs se révèlent de plus en plus complexes à gérer techniquement, financièrement et institutionnellement parlant.
La SSIGE l’a bien compris, elle qui propose non seulement un large éventail de formations et de certifications professionnelles, mais aussi une abondante documentation technique spécialisée. Elle a également mis en place un fonds de recherche pour l’eau (FOWA) destiné à trouver des solutions concrètes et durables dans un domaine dont les autorités politiques auraient tort de sous-estimer l’importance. (bw)
Pour en savoir plus
– Le site web de la SSIGE
– Le portail d’information de la SSIGE
sur l’eau potable Voir >
– La nouvelle loi vaudoise sur la distribution de l’eau Voir >
– Article aqueduc.info "Un guide pour les communes qui veulent coopérer dans le domaine de l’eau" Lire >