"Le Rhône ne surfe plus comme autrefois... Il a perdu ses dunes, ses étangs, ses forêts, ses appétits de forcené, ses querelles liquides. C’est le corset, le bagne. On ne l’aime pas." (René Farquet, "Le Rhône valaisan, un détail dérisoire", 1993)
En Valais, le Rhône a longtemps " régné en seigneur", lit-on dans le rapport censé préparer le terrain à une nouvelle correction de son tracé : "son cours formé de multiples bras était fréquemment enflé par les crues et se transformait en un puissant écoulement sur presque toute la largeur de la plaine."
Une première correction, dans la seconde moitié du 19e siècle, puis une deuxième après de graves inondations survenues en 1935, ont profondément modifié à la fois le décor de la vallée et la dynamique du fleuve.
"Le Rhône a été confiné entre deux digues longitudinales constamment surélevées et renforcées au fil des catastrophes encore fréquentes jusque dans les années 50. Les buts légitimes étaient de gagner des terres agricoles en drainant la plaine et de pouvoir vivre en sécurité même dans le voisinage immédiat des berges."
"Mobilisation historique"
Mais les hautes eaux de 1987 et 1993 ont fait prendre conscience aux Valaisans que l’endiguement du fleuve n’avait de loin pas résolu tous leurs problèmes. Dès 1995, ils ont commencé à parer au plus pressé, à collecter les données et à formuler des propositions pour une troisième correction du Rhône.
La grande crue d’octobre 2000 (la plus importante du 20e siècle) est venue confirmer l’urgence de cette vaste entreprise. Le projet prend forme, les premières structures se mettent en place, le gouvernement cantonal parle de "mobilisation historique". Et pour cause.
Un triple déficit
Le premier rapport publié en juin 2000 a mis en évidence que le Rhône souffre actuellement en Valais d’un triple déficit : sécuritaire, environnemental et socio-économique.
"Sécurité pour le futur" : le titre même du rapport montre bien que l’objectif de base de la 3e correction du Rhône est de "garantir la sécurité contre les crues et de rétablir ou de renforcer les fonctions biologiques et socio-économiques que le fleuve doit assurer".
Il faut donner la priorité à des "solutions durables à entretien limité", restaurer autant que possible la dynamique naturelle du fleuve, diminuer rapidement et efficacement les risques, aménager un corridor d’évacuation des eaux évitant les zones habitées.
Une meilleure relation entre le fleuve et la plaine
D’un point de vue environnemental, il s’agira surtout d’essayer de redonner davantage d’espace au Rhône, de restaurer les fonctions écologiques de son hydrosystème et de revaloriser son potentiel de biodiversité, bref, de "respecter autant que possible son tracé naturel ou, à défaut, le reconstituer".
Les objectifs socio-économiques visent une meilleure prise en compte des besoins de l’agriculture, à la diversification des activités touristiques, au maintien des potentialités énergétiques du fleuve (sans oublier que les grands barrages hydroélectriques construits dans les vallées latérales influencent considérablement le régime du Rhône).
Tout cela demandera évidemment beaucoup de temps et d’argent. C’est un projet "aux ambitions folles" et "d’envergure nationale", disent les Valaisans. Iil n’en est qu’à ses débuts. Il faut le peaufiner, le mettre à l’enquête publique, mobiliser les partenaires, rassembler les fonds, et, au bout du compte, le réaliser tronçon par tronçon. Rendez-vous dans une trentaine d’années. (bw)
Etat du Valais : 3e correction du Rhône, informations générales