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23 août 2008.

"La moitié de l’eau pour la production d’aliments est gaspillée"

« Du champ à la fourchette - Limiter les pertes et le gaspillage (...)

« Du champ à la fourchette - Limiter les pertes et le gaspillage dans la chaîne alimentaire » : sous ce titre, l’Institut international de l’eau de Stockholm (SIWI), l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et l’Institut international de gestion de l’eau (IWMI) ont publié un dossier conjoint dans lequel ils mettent le doigt sur l’immense gâchis d’eau dans la production de nourriture, demandent aux gouvernements de réduire de moitié, d’ici à 2025, la quantité d’aliments gaspillés et avancent quelques propositions concrètes pour que cet objectif puisse être atteint.

La moitié de la nourriture de la planète est gaspillée, indique le rapport des chercheurs des trois institutions publié à l’occasion de la Semaine internationale de l’eau de Stockholm (voir ci-contre) : d’énormes quantités d’aliments sont perdues lors de leur conditionnement et de leur transport, puis dans les supermarchés, les restaurants et les cuisines familiales. Cela signifie aussi que toute l’eau qui a été prélevée pour leur production l’a été inutilement.

Aux États-Unis par exemple, près d’un tiers de la nourriture est jetée dans les poubelles, ce qui représente en valeur marchande pas loin de 50 milliards de dollars. C’est comme si on laissait couler les robinets et laissait se répandre pour rien 40 milliards de litres. Autrement dit, suffisamment d’eau pour répondre aux besoins ménagers de 500 millions de personnes. Grâce au commerce international, ce qui serait épargné dans un pays pourrait bénéficier à d’autres régions du monde.

Ce gaspillage de nourriture se traduit différemment selon que l’on est pauvre ou riche. Dans les pays en développement, la majorité des pertes de nourriture survient pendant le processus de production, lors du transport ou des mauvaises conditions d’entreposage. Dans les pays riches, c’est surtout dans l’étape suivante, celle de la consommation – ou plutôt de la non consommation des produits agricoles jetés au rebut - que sont enregistrées les pertes les plus importantes. On notera aussi que les changements de régimes alimentaires (avec un plus grand accès par exemple à des produits carnés) amplifient forcément le gaspillage d’eau. En clair : les choix alimentaires ont d’une manière ou d’une autre des répercussions sur les ressources en eau.

Selon Jan Lundqvist, directeur du programme scientifique du SIWI, « si nous parvenons à améliorer la productivité de l’eau et à réduire la quantité de nourriture gaspillée, nous pourrons alors garantir une meilleure alimentation aux pauvres et assez de nourriture pour davantage de gens (…) L’objectif que nous proposons, à savoir une réduction de 50% des pertes et des gaspillages sur la chaîne de production et de consommation, est nécessaire et réaliste. » À condition toutefois de changer de mentalité.

Or, constate l’expert suédois, « si nous regardons la quantité d’eau dont nous avons encore plus besoin pour la nourriture (les besoins en alimentation devraient doubler d’ici 2050) et celle pour les produits agricoles à destination énergétique (les biocarburants) ... alors il y a de quoi s’inquiéter ». Cela d’autant plus que « dans nos sociétés urbaines, nous avons perdu le contact avec la réalité et nous ne savons plus d’où vient notre nourriture ni ce qu’il faut pour la produire ». Qui en effet de savoir qu’il faut environ 15’000 litres d’eau pour produire un seul kilo de viande de bœuf ? (Sources : rapports et communiqués officiels et agences)


“Saving Water : From Field to Fork – Curbing Losses and Wastage in the Food Chain” : Rapport en anglais disponible sur le site du SIWI

(*) L’Institut international de l’eau de Stockholm (SIWI) se présente comme un institut de recherche de solutions durables pour résoudre la crise mondiale de l’eau. Il mène dans ce sens différents projets d’études, publie les conclusions de ses chercheurs et propose des recommandations d’études sur différents thèmes liés à la gestion de l’eau. Voir : www.siwi.org




Infos complémentaires

« Dans nos sociétés urbaines, nous ne savons plus d’où vient notre nourriture ni ce qu’il faut pour la produire » (montage photo extrait du rapport "Du champ à la fourchette")


« Pour un monde
plus propre
et plus sain »


À Stockholm, l’édition 2008 de la Semaine mondiale de l’eau (17 au 23 août), l’un des grands rendez-vous annuels en la matière, s’est achevée sur des constats souvent peu réjouissants portés par ses quelque 2’400 participants. Lenteur des progrès dans le domaine de l’assainissement, explosion des demandes en eau, carences dans ses politiques de gestion, augmentation du gaspillage et de la pollution, écosystèmes en danger et autres symptômes alarmants leur font penser que la planète paraît proche d’une très grave crise.

Placée sous un slogan qui relève beaucoup de la méthode Coué – « Progrès et perspectives dans le domaine de l’eau : pour un monde plus propre et plus sain » - cette semaine aura tout de même permis de mettre le doigt sur quelques réalités trop souvent passées sous silence tels l’énorme gaspillage d’eau dans la production agricole ou le recours de plus en plus fréquent à des eaux usées pour l’irrigation.

« Nous avons eu un mode de vie très luxueux pendant les 25 dernières années sans nous soucier du tout de l’environnement, a fait remarquer John Anthony Allan, professeur britannique et lauréat du prix de l’eau de Stockholm 2008 pour ses recherches sur l’eau virtuelle. Il faut aujourd’hui changer la façon dont nous consommons, achetons et mangeons. »

À défaut de vraies décisions politiques et d’engagements concrets et contraignants, et malgré le fait qu’elle se transforme en haut lieu des lobbies en tous genres, cette Semaine de Stockholm a au moins le mérite de mettre l’accent sur la nécessité de changer les mentalités et les comportements dans le domaine de l’utilisation de l’eau. Nombre de gestes quotidiens, sans qu’on s’en rende même compte, ont en effet des conséquences immédiates sur la quantité et la qualité de cette ressource vitale. (bw)

 Site de la Semaine internationale de l’eau de Stockholm : www.worldwaterweek.org

Mots-clés

Glossaire

  • Interconnexion

    Pour assurer la continuité de l’approvisionnement de la population en eau potable de la meilleure qualité possible et en quantité suffisante, un distributeur doit disposer d’une ou plusieurs interconnexions de secours avec un ou plusieurs réseaux de distributeurs voisins. C’est l’une des solutions qui permet de garantir en permanence la sécurité d’une exploitation en cas d’accident ou en période de crise.

Mot d’eau

  • Jamais la même eau

    « Le cours de la rivière qui va jamais ne tarit, et pourtant ce n’est jamais la même eau. L’écume qui flotte sur les eaux dormantes tantôt se dissout, tantôt se reforme, et il n’est d’exemple que longtemps elle ait duré. Pareillement advient-il des hommes et des demeures qui sont en ce monde. » (Kamo no Chōmei, poète japonais, 1155-1216, "Hōjōki")


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