Les sherpas et sous-sherpas du Sommet - ceux qui préparent les décisions et mâchent les textes des chefs de cordées - ont tout de même planché sur un énième plan d’action consacré à l’eau, comme si les résolutions prises à Johannesburg et à Kyoto n’étaient d’aucun poids.
Ils ont fait ce que font habituellement les cancres en manque d’idées quand ils réécrivent des textes connus en faisant semblant, à coup d’astuces rédactionnelles, de leur donner un coup de neuf.
Peine perdue. Le document du G8 s’ouvre par une affirmation qui ravira les collectionneurs de lapalissades : "L’eau étant essentielle à la vie, le manque d’eau peut porter atteinte à la sécurité de l’homme". No comment.
De l’usage du futur en littérature politique
Pour le reste, aucun engagement réel. Des mots et encore des mots, et des verbes déclinés au futur, du genre "nous adopterons les mesures suivantes…" et "nous ferons tout notre possible pour… ".
De l’eau, il est aussi question dans le rapport sur la mise en œuvre d’un autre plan d’action, celui concocté spécialement pour l’Afrique lors du Sommet 2002 au Canada. Là, les intentions sont un peu plus précises.
Par exemple celle de l’Union européenne qui a proposé l’an dernier la création d’un Fonds européen pour l’eau d’un montant d’un milliard d’euros. Mais, pour le moment, ce n’est encore qu’un projet en discussion.
"L’autre monde " en mode répétitif
Les altermondialistes n’ont pas que manifesté dans la rue. A Annemasse, durant le week-end précédant le G8, ils ont organisé notamment un débat sur le thème "soif d’eau, soif de solidarité".
Leur plaidoyer réclamant "de l’eau pour tous" ressemble lui aussi à un exercice de réécriture. On y retrouve les mêmes idées fortes que celles déjà proclamées à Porto Alegre, Créteil, Florence et autres rendez-vous alternatifs consacrés à l’eau.
On l’aura donc compris : à Évian comme à Annemasse, rien de neuf. Chaque camp répète son discours dans son coin. Le G8 fait confiance aux idées de la Banque Mondiale et privilégie les partenariats avec les entreprises privées. Les altermondialistes parlent droits de l’homme et contrôle démocratique des services de l’eau.
Les uns et les autres peaufinent leur vocabulaire, mais le dialogue stagne au niveau zéro. On savait l’eau d’Évian peu minéralisée. Celle qu’on y a servie début juin était désespérément plate.
Bernard Weissbrodt
Documents
Plan d’action du G8 dans le domaine de l’eau
Rapport sur le plan d’action du G8 pour l’Afrique dans le domaine de l’eau
Plaidoyer "De l’eau pour tous" du "Sommet pour un autre monde"