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14 janvier 2003.

Gardez vos vieux saris pour avoir de l’eau potable !

Si vous habitez l’Inde ou le Bangladesh et que vous voulez (...)

Si vous habitez l’Inde ou le Bangladesh et que vous voulez obtenir une eau potable avec un minimum de moyens, il suffirait de la filtrer à travers un vieux sari plié au moins en quatre. Une équipe de chercheurs, dont la revue britannique "Nature" se fait l’écho, est arrivée à la conclusion que cette méthode on ne peut plus simple peut réduire de moitié les cas de choléra dans les régions victimes d’épidémies.

L’idée de filtrer l’eau à travers un sari - le vêtement traditionnel des femmes de l’Inde et du Bangladesh - est née d’une observation faite par un microbiologiste de l’université américaine du Maryland. Lui-même originaire de la région avait en effet remarqué que certains de ses compatriotes utilisaient de vieux saris pour filtrer leur boisson sucrée locale et en éliminer ainsi les insectes qui s’y étaient laissés prendre.

Des chercheurs américains, emmenés par Rita Colwell, ont travaillé pendant une année et demie dans une soixantaine de villages du Bangladesh. Le résultat de leurs tests scientifiques dépasse leurs espérances : la méthode du filtrage à travers les saris permet de réduire de moitié les risques de choléra.

Filtrer à défaut de cuire

Pour rappel, le choléra, cette infection intestinale extrêmement contagieuse qui fait toujours de terribles ravages, est dû à une bactérie (le "vibrio cholerae ") qui colonise l’intestin grêle, provoque des diarrhées abondantes et des déshydratations parfois mortelles, surtout parmi les jeunes enfants et les personnes âgées.

C’est du côté de l’eau qu’il faut chercher le principal vecteur de l’endémie. Son vibrion fait partie de la flore normale des milieux aquatiques, en particulier dans les eaux saumâtres et les estuaires. La première prévention passe donc par l’amélioration de la qualité de l’eau domestique.

Cuire l’eau est sans aucun doute la façon la plus efficace de la purifier, mais au Bangladesh, le bois de cuisine fait défaut, surtout parmi les populations dont la subsistance dépend des rivières, des lacs et des étangs. On sait aussi que dans ce pays bon nombre de puits sont aujourd’hui contaminés par l’arsenic.

Cherchez les copépodes !

Deux remarques pour comprendre la portée de ce filtrage : d’abord, s’agissant du choléra, la contamination dépend de la quantité de bactéries absorbées. Si l’on réduit fortement leur nombre, et même si on ne réussit pas à toutes les éliminer, on diminue considérablement les risques de maladie.

Ensuite, les bactéries du choléra ne se déplacent pas par elles-mêmes mais sont transportées par des copépodes, crustacés microscopiques qui foisonnent dans les planctons et dont le nom vient de leurs pattes en forme de rames. C’est précisément dans leurs cavités buccales et leurs poches à œufs que les vibrions se logent par milliers, à la manière de parasites.

Les vieux tissus mieux que les neufs

S’il est quasiment impossible de filtrer les bactéries elles-mêmes, le recours au sari permet par contre de retenir les crustacés qui les véhiculent. Les chercheurs ont même découvert qu’un vieux tissu, bon marché, filtre encore mieux qu’un autre tout neuf et coûteux, du fait que les vêtements usagés offrent une trame généralement plus fibreuse.

C’est simple, mais encore fallait-il y penser ! Les chercheurs en déduisent que ce procédé pourrait sans doute aider à combattre d’autres maladies liées à l’eau impure comme la dysenterie et la salmonelle. (bw)

Source : Kendall Powell, "Clothes clean drinking water", in "Nature", 14 janvier 2003

Référence :
Colwell, R.R. et al. Reduction of cholera in Bangladesh villages by simple filtration




Mots-clés

Glossaire

  • Interconnexion

    Pour assurer la continuité de l’approvisionnement de la population en eau potable de la meilleure qualité possible et en quantité suffisante, un distributeur doit disposer d’une ou plusieurs interconnexions de secours avec un ou plusieurs réseaux de distributeurs voisins. C’est l’une des solutions qui permet de garantir en permanence la sécurité d’une exploitation en cas d’accident ou en période de crise.

Mot d’eau

  • Jamais la même eau

    « Le cours de la rivière qui va jamais ne tarit, et pourtant ce n’est jamais la même eau. L’écume qui flotte sur les eaux dormantes tantôt se dissout, tantôt se reforme, et il n’est d’exemple que longtemps elle ait duré. Pareillement advient-il des hommes et des demeures qui sont en ce monde. » (Kamo no Chōmei, poète japonais, 1155-1216, "Hōjōki")


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