On sait depuis une cinquantaine d’années que les eaux souterraines de certaines provinces de Chine renferment des quantités importantes d’arsenic et la population touchée par cette contamination ne cesse de croître. La dernière étude en date (2001-2005) du Ministère chinois de la santé, portant sur 445’000 puits et captages, fait état de 5% de cas dans lesquels le seuil de 50 µg par litre était dépassé, ce qui concernerait directement près de 6 millions de personnes. Mais il faudra encore compter plusieurs dizaines d’années avant que tous les captages aient été contrôlés.
Les chercheurs de l’Eawag et leurs collègues de l’Université de médecine de Shenyang ont proposé une autre approche basée sur la modélisation : ils ont développé un modèle statistique travaillant avec les données géologiques, pédologiques et topographiques déjà existantes pour prédire les zones à risque et l’ont étalonné avec les concentrations d’arsenic déjà mesurées. Les résultats indiquent une excellente corrélation entre les prévisions et les zones contaminées ou épargnées telles que recensées dans les études du gouvernement.
Le modèle a également mis en évidence des zones potentiellement sensibles qui n’ont jamais été considérées comme telles, notamment les bassins du Tarim (Xinjiang), de l’Ejina (Mongolie intérieure) et du Hai He (Gansu) et la grande plaine du Nord (Henan et Shandong). Selon les modélisations, le seuil de 10µg/l - recommandé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) - devrait ainsi être dépassé sur près de 580’000 km2 et pourrait concerner quelque 20 millions de Chinois.
Il n’est pas impossible, dit-on du côté de l’Eawag, que ce chiffre surestime les risques d’intoxication, mais le fait est que, dans ses régions arides notamment, la Chine reste très dépendante des nappes phréatiques pour son approvisionnement en eau potable.
Mais les chercheurs sont cependant convaincus d’une part que ce modèle fournit un précieux complément d’information aux programmes de surveillance de la qualité des eaux souterraines, et d’autre part qu’il trouvera des applications dans d’autres pays confrontés au problème de l’arsenic, en Afrique ou en Asie centrale particulièrement, où aucune analyse des risques n’a encore été réalisée dans ce domaine très précis. (Source : Eawag)
Localisation des populations chinoises potentiellement exposées à des teneurs trop élevées d’arsenic dans l’eau potable. Les zones les plus sensibles sont les régions arides, où les eaux souterraines sont la seule source d’eau potable, et les zones très peuplées. (© Eawag)