L’une des toutes premières priorités des services publics est de garantir à leur population que l’eau qu’elle consomme ne présente aucun risque pour sa santé. Bien qu’il existe aujourd’hui pour cela un certain nombre de produits et de méthodes, c’est encore et toujours le chlore, utilisé depuis plus d’un siècle, qui a la préférence des spécialistes. C’est en effet un désinfectant qui permet de réduire ou d’éliminer la présence de micro-organismes, comme les bactéries et les virus, à l’origine de maladies hydriques graves, voire mortelles (choléra, fièvre typhoïde, etc.)
Même s’il peut présenter parfois quelques inconvénients (son goût et son odeur peuvent être parfois désagréables), le chlore a pour principaux avantages d’être très bien connu, peu onéreux, facile à utiliser et efficace sur la durée (une petite quantité protège l’eau durant tout son processus de distribution). Par ailleurs, il ne présente aucun risque d’un point de vue sanitaire. En pratique, sa teneur habituelle tourne autour du 0,1 milligramme par litre. Mais cette dose peut être augmentée si l’eau qui doit être désinfectée est de qualité douteuse.
Les réseaux de distribution d’eau des pays industrialisés sont généralement sous très haute surveillance, des analyses bactériologiques et chimiques y sont faites très régulièrement et selon des normes généralement très sévères, et les services responsables du traitement de l’eau potable disposent de technologies de filtration et de désinfection de plus en plus sophistiquées.
Ce n’est pas le cas dans un très grand nombre de pays en développement, et plus particulièrement dans les périphéries des villes et en milieu rural où les réseaux d’eau sont quasi inexistants, où l’environnement et le milieu ambiant sont souvent porteurs de bactéries faute d’installations sanitaires de base, où l’eau peut être facilement contaminée au puits, durant son transport et dans ses utilisations domestiques.
La bonne vieille eau de Javel
Plusieurs moyens et méthodes de désinfection sont proposés, faciles à mettre en œuvre et relativement peu coûteux : bouillir l’eau avant tout usage alimentaire (mais cela pose problème dans les régions pauvres en bois de chauffage), filtrer l’eau à travers des filtres à sable (mais ce procédé n’élimine pas les bactéries), traiter l’eau aux rayons UV solaires (mais cela dépend de l’ensoleillement).
Reste à privilégier la chloration, et plus concrètement l’hypochlorite de sodium, plus connue sous le nom d’eau de Javel découverte à la fin du 19e siècle par le chimiste français Berthollet et considérée aujourd’hui comme le plus universel des désinfectants. Toutefois, dans des pays pauvres, cela ne va pas sans quelques problèmes « commerciaux » : produits mal identifiés ou trafiqués, mauvais conditionnement (l’eau de Javel doit être conservée dans des contenants opaques), stockages inadéquats (températures élevées), etc.
Mais cela n’enlève rien à ses mérites. Et si on lui porte aujourd’hui un intérêt renouvelé, c’est parce que l’on peut recourir à une « technologie appropriée » (simple, peu encombrante et peu coûteuse, d’emploi facile) qui permet aujourd’hui à une petite collectivité, quartier ou village, de produire elle-même sa propre eau de Javel, à savoir l’électrolyse d’une eau salée grâce à une source de courant provenant d’une batterie. Une ONG et une PME, ayant toutes deux siège à Genève, proposent divers kits d’appareils utilisant cette technologie (voir ci-contre).
Une petite partie seulement de la réponse
Quoi qu’il en soit des aspects bénéfiques de cette technologie adaptée aux moyens de ces petites collectivités, cela ne résout qu’une partie des problèmes d’eau potable. Il y a un immense effort à faire du côté des pouvoirs locaux, régionaux et nationaux, et avec la solidarité internationale, pour que plus d’un milliard de personnes de par le monde aient enfin un accès à l’eau conforme à leur dignité et à leurs droits. Il en va de même, pour plus de deux milliards et demi de gens, en ce qui concerne l’aménagement d’infrastructures sanitaires au moins rudimentaires.
Et tout cela suppose aussi des campagnes de sensibilisation au B.A.-BA de l’hygiène et des programmes d’éducation sanitaire de manière à changer les habitudes et les comportements individuels et collectifs. Sans quoi tout effort d’amélioration de la qualité de l’eau restera sans aucun effet, avec le risque que les maladies hydriques continuent leurs ravages mortels. (bw)