Les experts l’ont baptisée GPGP. Great Pacific Garbage Patch. Cette grande zone de déchets qui flotte au milieu du Pacifique Nord entre les côtes de Californie et l’archipel d’Hawaï est connue depuis une vingtaine d’années. Mais prendre la mesure de cette immense décharge est un "exercice laborieux" qui réclame de gros moyens.
Après trois années de recherche, des expéditions de terrain, des expériences de laboratoire et des analyses de données, une équipe internationale de 16 chercheurs ont conclu que ce "continent de plastique" est bien plus vaste que ce qu’on pensait : sa surface serait d’environ 1,6 million de km2 (soit plus de trois fois la superficie de l’île de Madagascar), il contiendrait 1’800 milliards de morceaux de plastique et pèserait quelque 80’000 tonnes.
Les résultats de cette recherche, conduite par Laurent Lebreton, océanographe réunionnais, et publiée dans la revue Scientific Reports [1], avancent des chiffres nettement supérieurs aux évaluations et mesures faites jusqu’à présent. Cela s’expliquerait à la fois par l’importance des outils mis en œuvre (méga-réseaux de filets, reconnaissances aériennes, analyses d’échantillons plus performantes, etc.) mais aussi par l’augmentation quasi exponentielle de la pollution plastique dans les eaux subtropicales du Pacifique.
Laurent Lebreton fait remarquer à ce propos que les mécanismes qui provoquent les accumulations de ces déchets plastiques dans des zones particulières des océans sont encore mal compris même si l’on sait qu’elles résultent d’immenses tourbillons géants générés par les courants marins. Par contre, il est d’ores et déjà prouvé que les microparticules de plastique qui flottent à la surface peuvent au fil du temps être entraînées vers des strates d’eaux plus profondes.
Les plus gros débris sont principalement constitués de conteneurs dégradés, de capsules de bouteilles, de caisses à flotteurs, d’engins de pêche abandonnés, etc. Mais à long terme ce matériau finit par se dégrader en milliards de minuscules microplastiques (de moins de 5 mm). Particulièrement néfastes pour la santé mais difficilement récupérables, ceux-ci sont alors ingérés par les poissons et entrent dans la chaîne alimentaire. D’où la nécessité d’agir de toute urgence pour mettre fin à l’afflux croissant de ces déchets plastiques dans les océans.